Orama Nigou, Vahaeinui Doom (Vashee), Evrard Chaussoy et Jonathan Mencarelli, actuellement en résidence d’artistes à la Cité internationale des arts de Paris, présentent leur exposition collective « Exploration(s) ». A voir, jusqu’au 20 octobre à la Délégation de la Polynésie française.

Si vous êtes à Paris ou dans la région, il est encore temps d’aller visiter cette exposition « Exploration(s) », qui témoigne de l’évolution du travail artistique de ces quatre Polynésiens en résidence à la capitale depuis le mois d’août dernier. Rappelons que ce programme conçu par le ministère de la culture de la Polynésie française avec la Cité internationale des arts de Paris permet aux lauréats de bénéficier d’un accompagnement artistique et professionnel par la Cité. Cette expérience est une réelle opportunité pour les artistes polynésiens de s’ouvrir sur le monde artistique parisien, d’explorer de nouvelles techniques, de rencontrer d’autres artistes venus du monde entier et bien-sûr de se faire connaitre. Cette exposition leur offre justement une belle visibilité, boulevard Saint-germain en plein cœur de Paris. Nous leur avons demandé de nous parler de leur processus artistique et de nous présenter leurs œuvres exposées.

L’installation performance d’Orama Nigou

Artiste chercheuse, designer textile, Orama explore les relations à la matière avec le prisme de sa culture. Son processus de création passe notamment par l’étude d’objets de musées qui lui sert à déduire techniques et esthétiques pour mettre en œuvre la plume.

« Dans l’exposition Exploration(s), je présente une installation performance où j’incarne Rūmia, l’œuf du démiurge Ta’aroa, dans lequel je perçois une entité primordiale, une incarnation originelle de la matière. Cycle de Rūmia, acte 1 explore l’acte créateur, plonge dans le geste, la conception, la relation entre le créant et le créé, le fabriqué fabriquant et le fabriquant fabriqué. »

 Les toiles « messages » d’Evrard Chaussoy

Originaire de Raiatea, Evrard Chaussoy est issu d’une famille d’artistes. C’est tout naturellement à travers la peinture qu’il explore les scènes de la vie quotidienne des Polynésiens. Son travail évolue vers une expression artistique plus contemporaine où la matière recouvre les traits pour laisser place au questionnement.

Je présente six peintures et deux plaques gravées issues de mes réflexions depuis que je suis arrivé à la Cité des arts. Ce que je vis ici dépasse mes espérances et me permet de développer une approche différente dans mon travail artistique. A travers ces réalisations, j’amène l’observateur à se questionner sur la disparition de la nature, de la culture face à la mondialisation et à la modernisation. Tout en préservant, la méthode d’impression traditionnelle sur paréo par empreintes que je pose en fond sur mes toiles, je viens ensuite effacer, abîmer avec la matière subtilement ces empreintes avec plus ou moins de transparence, comme un monde amené à disparaitre ou qu’on ne veut pas voir disparaître.

 Le mixage polynésien et nouvelles influences de Vashee

Originaire de Tupuai, Vahaeinui Doom, dit Vashee, est un artiste multidisciplinaire. De l’illustration, à la sculpture, en passant par la peinture, tout est bon pour valoriser le patrimoine iconographique ancestral polynésien, et plus particulièrement celui des îles australes.

Cette résidence d’artiste me permet de découvrir à travers l’architecture de la ville, les monuments, les musées… D’autres arts visuels. Les échanges avec les autres artistes de la résidence issus des quatre coins du monde sont très enrichissants et inspirants.  Le travail présenté à l’exposition de la Délégation est une synthèse de ce que mes yeux et mon esprit consomment tout au long de ce « pèlerinage ». C’est comme un crossover entre l’univers polynésien et toutes les influences auxquelles j’ai été sensibilisée. Ces œuvres viendront enrichir l’exposition Convergence, prévue pour le mois de décembre à la salle Muriavai à la Maison de la culture.

 Les mains tatouées de Jonathan Mencarelli

Jonathan Mencarelli est sculpteur spécialisé dans la taille directe sur pierre. Cet artiste travaille principalement le basalte et la phonolite sur Moorea. Ses créations résultent d’une réflexion sur le patrimoine culturel polynésien et son interprétation contemporaine.

Cette sculpture Maramarama « lumière » représente des mains jointes en prière tenant un bout de silex. Des symboliques fortes sont présentes, notamment par les matériaux employés qui décrivent mon cheminement artistique à Paris. Le granit nous parle de mon parcours pédestre entre les lieux culturels et du pavage présent partout. Le silex, quant à lui, est présent naturellement dans le sous-sol parisien, et fait évidemment référence au feu et donc à la lumière. Les mains sont faites d’après l’œuvre d’Auguste Rodin :  » la cathédrale « . Il s’agit donc d’un symbole sculptural du rayonnement culturel polynésien, par le biais de motifs traditionnels marquisiens. J’ai, pour ainsi dire, tatoué les mains de Rodin.

Propos recueillis par Isabelle Lesourd.

Photos des artistes et de la Délégation de la Polynésie française.

L’exposition est ouverte au public jusqu’au vendredi 20 octobre, de 9 heures à 17 h 30.

Entrée gratuite.

Délégation de la Polynésie française, 28 boulevard Saint-Germain, Paris.